Les entreprises françaises sont peu nombreuses à externaliser leur processus de recouvrement. En effet, seulement 15% des décideurs qui font face à des problèmes de gestion d’impayés font appel à des prestataires externes. Cette faible proportion s’explique par la perception qu’ont les décideurs des prestataires de recouvrement. 48% des dirigeants de TPE/PME ou des décideurs financiers de grandes entreprises n’ont pas une bonne image des ces acteurs.
Découvrez le témoignage de Nicolas Nore, CFO B2B Gas & Power France, Engie.
Quelle est la clé d’une procédure de recouvrement réussie ?
Pour personnaliser les relances, avez-vous fait appel à un acteur du digital ?
Sans un bon accompagnement, le recouvrement sera mal vécu par le client. De ce point de vue, les acteurs du digital peuvent aider sur le comportement payeur du client. Par exemple, chez Engie B2B France, cette année, nous sommes à 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires TTC à encaisser. Si l’on opte pour un acteur du digital avec des données anonymisées, cela permettra de mieux personnaliser la relance qui doit être faite au bon moment et sur le bon canal de communication : par exemple, un SMS pour un particulier et un mail ou un appel téléphonique pour un grand compte. Aujourd’hui, on ne travaille pas encore avec un acteur du 100% digital (nous avons déployé notre solution digitale interne). En revanche, nous avons quand même des échanges avec certains d’entre eux, GCollect par exemple. Il y a chez ce dernier une particularité qui fait la différence : l’empreinte locale. Il détient un réseau de personnes qui font de la relance très localisée. Cela paraît anodin mais une procédure a plus de chances d’aboutir quand les interlocuteurs habitent la même ville. Cela ajoute de la proximité avec le client.
Vous mettez en avant l’idée que tous les acteurs de l’entreprise ont un rôle à jouer dans le recouvrement. Vous avez instauré une culture cash chez Engie ?
Avant de parler de recouvrement, il est essentiel de parler de maîtrise de ses processus Order to Cash et de l’intégration des spécificités de ses clients dans ce parcours de gestion du cash. Cela va de la contractualisation en passant par l’accompagnement client au moment de la mise en place de la prestation, puis l’émission des factures, le paiement avant l’échéance et enfin le recouvrement le cas échéant. La maîtrise de chacune de ces étapes par l’ensemble des services d’une entreprise (les commerciaux, les services clients, les services de facturation et recouvrement) aura un impact positif sur le BFR (besoin en fonds de roulement) de votre entreprise. C’est pour cette raison que nous avons mis à contribution toutes les parties prenantes de notre entreprise. Avant que nous entamions ce changement il y a trois ans, le recouvrement était uniquement l’affaire du département recouvrement. Désormais, tout le monde s’est approprié le sujet. Par exemple, les commerciaux ne vendent pas uniquement de l’énergie et des services de gestion de l’énergie. Ils vendent aussi des factures et font du cash collection. On peut parler à ce niveau-là de véritable changement culturel dans l’entreprise.
En parallèle de cette culture cash, le recours à l’intelligence artificielle (IA) dans la personnalisation du recouvrement peut-elle aussi augmenter le taux de succès d’une procédure ?
Dans la mesure où la personnalisation de la relance est un facteur clé de succès, il est évident que le machine learning et l’IA sont des solutions puissantes pour un meilleur taux de recouvrement. Grâce notamment à une relance du client au bon moment et avec le bon canal. Pour permettre cette réussite, il convient d’industrialiser les process en amont du recouvrement. Cela permet de fluidifier le parcours client, organiser la donnée et limiter les irritants clients et collaborateurs. Dès lors que ce processus est efficace et optimisé, la mise en place d’outils d’IA permet d’aller encore plus loin dans un recouvrement d’excellence avec un meilleur ciblage. Mieux encore, si cette mise en place s’accompagne d’une démarche responsable et éthique, cela renforcera le caractère fidélisant.
Ces nouveaux outils ne pourraient-ils pas redorer le blason des acteurs du recouvrement ? Selon notre étude réalisée avec l’institut YouGov, près de 50% des dirigeants n’ont pas une bonne image de ces acteurs… ?
Si ces outils permettent une meilleure fidélisation client et donc, par conséquent, peuvent améliorer l’image des acteurs du recouvrement, il ne faut tout de même pas perdre de vue que ces outils d’aide à la décision n’enlèvent rien aux travaux d’analyses, d’amélioration continue et de recouvrement de cas complexes par les collaborateurs qui auront toujours des actions à réaliser. C’est d’ailleurs par l’anticipation des besoins, par de la formation, par le déploiement d’une culture d’innovation que l’humain apportera sa valeur ajoutée. C’est ce que nous avons compris chez Engie.