Le recours à un prestataire de recouvrement est encore peu répandu. Pourtant, beaucoup d’entreprises se disent prêtes à externaliser leur processus de recouvrement. Parmi ce qui influencerait le plus les décideurs dans le choix d’un prestataire, on retrouve notamment la garantie de préserver la relation avec leurs clients. On retrouve ensuite la facturation au succès, sans avance de frais ni frais de dossiers. Enfin, l’élément le plus important est le montant des honoraires, qui doit être calculé au réel montant des factures.
Découvrez le témoignage de Céline Ngo, Directrice administrative et financière, JCB.
Selon vous, avoir recours à une FinTech allégerait-il la gestion du process de recouvrement de vos impayés ?
Dans la plupart des entreprises, il y a un problème de gestion des créances. En effet, cette gestion doit se faire très en amont, dès l’émission de la facture : c’est la meilleure façon d’accompagner le client dans le paiement. Sauf que souvent, dans les entreprises, les factures ne sont pas arrivées dans les bons délais au service Comptabilité. Soit parce qu’elles sont retenues entre les mains du service donneur d’ordres, soit parce qu’elles sont en attente de validation du responsable. C’est pour contrer ce système qu’il est intéressant de faire appel à une fintech. Une fintech suit le process et peut par exemple faire des envois de mailing automatisés et utiliser même d’autres canaux de communication pour s’adresse au client au meilleur moment. On sensibilise davantage le client au paiement s’il reçoit un calendrier d’échéances pour régler ses factures et s’il « bénéficie » de relances adaptées.
Avez-vous déjà fait appel à un acteur du recouvrement ?
Pas encore. Mais je compte bien me pencher sur la question. Chez JCB, nous traitons encore le recouvrement en interne. Nous avons récemment embauché une seule personne pour faire tout le recouvrement. Cela est insuffisant compte tenu du volume des impayés : il faut savoir que JCB fournit des engins de BTP type tracteur ou pelleteuse, donc un impayé peut monter dans les alentours de 200 000 euros. Recruter un acteur du digital nous permettrait non seulement de soulager la personne de tâches ingrates pour lui confier des activités à plus forte valeur ajoutée. Je suis également convaincue que cela nous couterait aussi moins cher !
Selon notre étude réalisée avec l’institut YouGov, près de 50% des dirigeants de TPE/PME ou des décideurs financiers dans de grandes entreprises n’ont pas une bonne image des acteurs du recouvrement. Quelles en sont les raisons, selon vous ?
Arriver à l’étape du recouvrement est par essence forcément négatif. Mais selon moi, si l’on en arrive là, c’est parce qu’administrativement, les équipes ont mal travaillé. Souvent, il y a un retard de traitement de la facture, soit parce qu’elle a mal circulé entre les différents services de l’entreprise, soit parce que le circuit de validation de la facture peut parfois être long dans certaines entreprises. J’ai pu le constater à fois chez JCB comme dans mon ancienne entreprise, chez Class’Croute. Ces deux organisations rencontrent ce genre de problème parce qu’elles digitalisent trop peu leur process. J’en reviens donc à l’idée que la digitalisation peut paradoxalement personnaliser la relation avec le client. En réalité, le schéma est simple : si les rappels se font avant la date d’échéance de la facture, on peut éviter une grande partie de retard de paiement. Tout le monde y gagne : le client, qui dispose d’un meilleur suivi, et le fournisseur, qui ne met pas la pression au dernier moment et de façon maladroite sur le client.
Vous soumettez l’idée qu’un retard de paiement est la conséquence d’un manque de coopération entre les services. Faut-il insuffler une culture cash au sein d’une organisation pour améliorer le business au quotidien ?
Le pire dans une société, c’est le cloisonnement. À partir de ce constat, il est évident que la culture cash est essentielle. Je reprends mon idée directrice selon laquelle tout le monde au sein d’une organisation doit être de la partie pour sensibiliser les clients en amont. Délaisser le recouvrement aux seuls comptables peut conduire rapidement à une situation de conflit avec le client. Car concrètement, le comptable, après avoir effectué trois relances, va bloquer le compte du client défaillant. C’est alors que le commercial à l’origine du contrat va prendre le relais et se penser légitime à intervenir dans le litige. Résultat : soit cela refroidit la relation client-fournisseur, soit le commercial tente de geler l’impayé pour garder de bonnes relations avec son client mais cela pénalise la trésorerie… C’est donc totalement improductif puisque l’on sait que la fluidité d’encaissement améliore nécessairement les relations commerciales.
Selon notre étude, plus d’un sondé sur deux considère que l’intelligence artificielle (IA) peut personnaliser le processus de recouvrement. Selon vous, l’IA est-elle un outil clé dans une approche customer centric ?
Le recouvrement est un sujet sensible : recourir à la technologie pour personnaliser la relation avec le client s’avère donc nécessaire pour multiplier les chances de régler une facture impayée. L’IA peut pallier les problèmes de coopération entre les services et les errances administratives qui en découlent. La rigueur dans la gestion de créances est essentielle, le suivi doit être régulier et rythmé. Et manifestement, ce qu’un service comptable seul ne peut pas faire, l’IA, elle, peut le faire. Mais l’IA a ses limites. En effet, lorsqu’on conteste la facture, elle doit laisser sa place à l’humain. Lui seul est indispensable pour résoudre le litige commercial.