Avec l’émergence des FinTech, de nouvelles solutions technologiques sont proposées pour aider les entreprises à optimiser leur gestion de créances.
Mais quelles sont les attentes des entreprises vis-à-vis des sociétés de recouvrement ?
Découvrez le témoignage de Déborah Chanson, Directrice Credit Management, Edenred France.
Selon vous, avoir recours à une FinTech allégerait-il la gestion du process de recouvrement de vos impayés ?
La liste des avantages est conséquente. Mais quelle est la clé d’une collaboration parfaite avec une FinTech du recouvrement ?
Le niveau de transparence avec la Fintech de recouvrement doit être maximum ! Le client doit pouvoir accéder en temps réel aux informations mises à jour : niveau de relance, qualification, compte rendu d’appels. Il est important que les sociétés de recouvrement puissent fournir un reporting régulier. Cela permet de pouvoir ajuster rapidement les scenarii et la stratégie, en fonction des résultats obtenus. Pouvoir industrialiser au maximum les processus avec la fintech est également important. Cela passe soit par l’envoi simplifié des données soit en mutualisant une partie de nos plateformes. Cela évite les échanges de fichiers tels que les balances âgées, factures en litiges ou suivis réclamations.
Si certaines actions ont déjà été menées, celles-ci doivent pouvoir être partagées quasiment sans nouvelles interventions des équipes internes. Sans cette automatisation des échanges, le risque est de perdre du temps dans un transfert sans valeur ajoutée d’informations déjà constituées. Le modèle deviendrait alors moins efficace.
Puisque les actions de recouvrement perdent en efficacité quand elles sont trop espacées dans le temps, faire appel à un acteur du recouvrement n’est-elle pas la bonne solution ?
L’efficacité des acteurs du recouvrement tient au fait que leur travail est exclusivement consacré au recouvrement. Là où ou contraire, nos gestionnaires sont souvent multi-tâches. Ces sociétés, disposant d’un vivier de chargés de recouvrement, sont donc parfois en mesure de répondre plus rapidement. Transmettre ces dossiers en marque blanche permet donc aux équipes de continuer sur d’autres dossiers et d’avoir l’assurance que la procédure entamée ira jusqu’au bout. Enfin, en intervenant en leur nom et toujours en phase amiable, ces acteurs du recouvrement peuvent débloquer des situations.
La carte « société de recouvrement » peut faire réagir le débiteur. Il est fréquent d’observer un « effet psychologique » lors de cette phase amiable. Le client qui ne présente pas de litiges ou de difficultés particulières paiera pour éviter la phase contentieuse. Rappelons aussi que les situations d’impayés ne se planifient pas. Et lorsque la phase contentieuse est nécessaire, les Directions Juridiques des entreprises n’ont pas toujours la ressource ou la disponibilité sur le moment. Les sociétés de recouvrement offrent alors la possibilité de bénéficier de leur réseau d’avocats qui vont pouvoir suivre et piloter les procédures contentieuses.
Plus un retard de paiement est pris à temps, plus les chances de récupérer les sommes sont grandes. Il nous est arrivé de confier des créances et de les recouvrer juste avant une défaillance ou un rachat dans lequel notre créance n’était pas reconnue. Enfin, un grand nombre des fintechs du recouvrement ont des contrats basés sur des « Success Fees ». Donc on ne perd rien à essayer !
A quel point un retard de paiement a-t-il déjà impacté votre entreprise ?
Comme beaucoup d’entreprises, il nous est arrivé d’être confrontés à des impayés. Si la créance impayée est significative, le service recouvrement va tout mettre en œuvre pour obtenir le paiement. Il va alors dérouler les étapes classiques de relances. Nous allons rapidement partager la situation avec la direction commerciale, qui peut nous aider à comprendre l’origine de l’impayé et participer à son recouvrement. Sans réponse rapide, il nous faut décider très vite et faire appel à une société de recouvrement externe peut permettre de faire avancer des situations qui apparaissent bloquées de prime abord.
Nous savons aussi que les actions de recouvrement perdent en efficacité si elles sont trop espacées dans le temps. Et en cas de non-réponses des clients, il faut au contraire accélérer la relance pour comprendre l’origine de l’impayé : un litige, une réclamation, ou par exemple, des difficultés de trésorerie. Rien de plus frustrant pour les équipes que de ne pas obtenir le paiement faute de temps disponible.
Les chargés de recouvrement dans les sociétés consacrent une partie de leur temps à la gestion des litiges, aux diverses sollicitations clients internes et externes, aux réunions. Et même si une facture reste valable 5 ans, délai légal de prescription, on sait que certaines preuves de livraison ou de service deviennent rapidement difficiles à produire avec le temps. C’est particulièrement le cas pour les bons de livraisons par exemple.
Près de 50% des dirigeants d’entreprises n’ont pas une bonne image des acteurs du recouvrement. Quelles en sont les raisons selon vous ?
Le recouvrement doit rester éthique et respectueux. Les acteurs du recouvrement ne doivent pas utiliser des méthodes « culpabilisantes » d’une autre époque. Un recouvrement efficace se mene sans agressivité ou harcèlement. Un retard de paiement peut arriver, peut s’expliquer et doit pouvoir se régulariser dans de bonnes conditions. Les acteurs du recouvrement doivent disposer d’une « trousse à outils » permettant de proposer des solutions adaptées. C’est là que se situe la valeur ajoutée des Cash Collectors. C’est pourquoi les outils modernes doivent être utilisés avec intelligence. Attention aux relances automatiques inadaptées, impersonnelles, mal séquencées ou sans suivi qui irritent davantage les sociétés relancées.
Sur les deux dernières années, notre DSO s’est amélioré de façon significative. Ce succès tient au fait que cet indicateur est perçu par les équipes comme une mesure de performance et un critère de mesure de la satisfaction clients. Un client satisfait est un client qui paie bien !
Selon notre étude, plus d’un sondé sur deux considère que l’intelligence artificielle (IA) peut personnaliser le processus de recouvrement. Selon vous, dans quel(s) cas l’IA peut-elle augmenter le taux de succès d’une procédure ?
Il s’agit d’un sujet qui nous intéresse particulièrement chez Edenred France. Bien que dotée des dernières technologies dans le cadre de ses relances clients (IA, mails interactifs, logiciel de centre d’appels, gestion électronique de documents, espace clients…), notre approche nous permet de personnaliser nos processus de recouvrement par des scenarii adaptés. L’IA nous permet d’être plus efficaces dans le nombre et le choix des tâches à réaliser. Particulièrement celles sans valeur ajoutée. Nos statistiques montrent que les scenarii calculés par l’IA demandent moins d’interventions et sont plus efficients que les autres scenarii. En définitive, l’IA a pour effet de laisser davantage de temps pour une relation clients « humaine » et de qualité. La satisfaction de nos équipes recouvrement est aussi un enjeu du quotidien. Ces outils permettent à chaque « Cash Collector » d’avoir un positionnement clair et un rôle reconnu au sein de l’organisation.
Ces nouvelles technologies nous permettent de mettre en avant nos métiers. Elles proposent aussi des environnements « user friendly » et contribuent au bien-être au travail de nos collaborateurs, disposés à être à l’écoute de nos clients. Et contrairement aux idées reçues, la mise en place de solutions modernes et digitales n’a pas eu pour conséquence une réduction des effectifs au sein d’Edenred France. Au contraire, les équipes au sein du département Credit Management ont augmenté sur les deux dernières années.